En finir avec les inégalités familiales

Il est simple : que nous formions une famille biparentale, homoparentale, monoparentale et/ou recomposée ; et que nous soyons ou non en couple, marié, pacsé ou en union libre, nous devons, en tant que parents, avoir les mêmes droits.

Les mêmes droits, mais aussi les mêmes devoirs et les mêmes responsabilités. Car la parentalité nous oblige, envers nos enfants, envers l’autre parent, et envers la société.

L'égalité familiale est un principe républicain, pas un concept féministe.

Ce principe est pourtant méconnu en France. L’une des premières missions de NVEF est de le promouvoir. Si on ne parle pas encore d’égalité familiale, c’est parce qu’on ne parle pas des inégalités familiales.

On continue ainsi de présenter comme "universelles" des allocations familiales accordées aux seules familles ayant au moins deux enfants. Et ce n'est là que l'arbre symbolique, en ce qu'il représente les desseins natalistes qui président aux politiques familiales, qui cache la forêt des inégalités familiales. Elles ont des effets socio-économiques désastreux pour les femmes.

Nous sommes tous empêtrés dans un déni collectif : nous refusons de voir, de penser la famille – toujours considérée comme un idéal patriarcal à atteindre –, comme le lieu de reproduction des inégalités de genre. C’est ce qu’elle est pourtant, aussi sûrement que le foyer est le lieu de la perpétuation de la domination et de la violence masculine*.

Les inégalités naissent et grandissent avec les enfants.

Les enfants apprennent par mimétisme, en observant le premier modèle qu'ils ont sous les yeux. Or, dès la naissance, une organisation familiale inégalitaire et une éducation différenciée selon le sexe se mettent en place, sans même que nous en ayons toujours, pour beaucoup d'entre nous, conscience.

Nous félicitons nos petites filles lorsqu'elles sont sages et disciplinées. Nous ne faisons que les préparer à accepter leurs futures responsabilités familiales. Nous excusons les bêtises de nos petits garçons lorsqu'ils sont turbulents et ne respectent pas les règles. Nous les préparons à l'indulgence dont ils bénéficieront une fois adulte, s'ils n'assument pas leurs responsabilités parentales.

L'irresponsabilité parentale est institutionnalisée.

Les institutions entérinent ce modèle. Il n’existe aujourd’hui aucun dispositif en France pour informer les parents de ce à quoi ils s’engagent en mettant au monde un enfant. Quels seront leurs droits, leurs devoirs et leurs responsabilités à partir du moment où leur enfant naîtra. Quels seront, surtout, les droits de cet enfant, qu’ils auront pour premier devoir de respecter et de faire respecter auprès des tiers.

Cette ignorance entretenue résulte d'un contrat tacite de notre société : les mères assumeront toutes ces responsabilités, sans partage et quoiqu’il leur en coûte. C’est ce qu’elles découvrent, pleinement, au moment de la séparation. Et c'est ce qu'elles font, de fait, puisque la société ne contraint nullement les pères – qui ont pourtant reconnu leur enfant à la naissance – à respecter leurs obligations afférentes à la si mal nommée autorité parentale.

Les enfants sont les premières victimes de ces inégalités.

Le modèle patriarcal de la famille hypothèque l'avenir de millions d'enfants dans notre pays : près de la moitié des mineurs grandissant auprès d'une mère célibataire – lesquelles représentent 1,6 million de familles monoparentales – vivent sous le seuil de pauvreté.

Tous les aspects du quotidien de ces femmes et de leurs enfants sont affectés : accès à un logement digne, à des soins et à une alimentation de qualité... et réduction drastique des chances de réussite scolaire des enfants.

De ce « quoi qu’il leur en coûte », les futures mères ne sont pas non plus informées, ni toujours conscientes tant la la fabrique des inégalités économiques au sein du couple parental est insidieuse.

Pourtant, des statistiques, des études sociologiques, des ouvrages journalistiques, de plus en plus nombreux, documentent ces inégalités. Pourtant, des militantes – et des militants – féministes, de plus en plus nombreuses, travaillent et mobilisent sur ces sujets.

NVEF n’invente rien.

Nos idées sont le prolongement de ce mouvement que nous rejoignons en portant, à travers ce principe d’égalité familiale, une conception féministe et inclusive de la famille.

Nous faisons des propositions permettant de donner un cadre à des revendications qui existent déjà.

Ce cadre, c'est un contrat civil d'union parentale.

A l'intérieur de ce cadre, nous proposons deux mesures de lutter contre l'appauvrissement systémique des mères après la vie conjugale :

Plus largement, nous nous associons à toutes les associations – de défense des droits des femmes et des enfants, de mères isolées, de parentalité féministe, de familles LGBTQIA+… – qui œuvrent déjà et de longue date en faveur de l’égalité familiale. Pour dresser un revendicatif commun et porter, ensemble, une grande loi sur la famille du XXIe siècle.

*Les violences intrafamiliales sont le premier motif d’intervention des forces de l’ordre en France (400 000 par an), devant tous les autres faits de délinquance. Plus de la moitié des « coups et blessures volontaires » enregistrés par les services de police surviennent dans le cadre familial – incluant les violences sur ex-conjointes. Source : "Insécurité et délinquance en 2022", le bilan statistique.

« Toutes les familles – et chaque parent en leur sein – doivent être égales en droits. » Le titre de cette tribune du Monde, initiée par la (future) présidente de NVEF en novembre 2023, résume le principe de l’égalité familiale.

Au nom du Collectif pour une parentalité féministe, cette tribune a recueilli une centaine de signatures.